Suite du précédent article consacré à la « mise en plâtre » de la Maison Haute # 1. Le plaisir des matières et de la lumière, celui aussi de découvrir « après coup » l’objet fabriqué grâce à la distance donnée par la photo.
(Les mauvaises langues diront que je documente photographiquement des étapes que mon manque de soin et/ou de talent risque de détruire dans la suite du processus de fabrication !!)
Catégorie : matériaux, matériel
Le coin du p’tit chimiste # 2 : colles bio
Mes essais pour fonctionner avec des produits « bios et naturels » ne se révèlent pas toujours concluants, du moins pour mon activité de « cartonneur/maquettiste ». Difficile par exemple de fabriquer une colle suffisamment épaisse et à prise assez rapide, susceptible de remplacer une bonne colle vinylique pour le collage des cartons. On a beau vouloir se la jouer zen, pas question d’attendre une nuit que les pièces se tiennent quand on en a plus de 150 ou 200 à assembler pour chaque modèle réduit… Mais les essais continueront, cet article sera donc « évolutif ».
Par contre, certaines colles se révèlent idéales pour d’autres activités, comme le marouflage du papier sur toile, la fabrication de supports à base de couches de papier encollées, etc. et parmi elles la plus simple qui soit, la colle de farine. Testées aussi la colle à la caséine (ouais) et la colle de riz (bof, gardez-le pour le risotto).
Colle de farine ♥♥♥
Une recette ancienne toujours utilisée par les restaurateurs d’antiquités. Dans une casserole, mélanger 2 cuillères à soupe de farine de blé et 1 cuillère à café de sucre avec éventuellement un pincée de sel. Le sucre a un effet retardateur de prise. Faire chauffer à feu doux en ajoutant un peu d’eau, mélanger au fouet pour éviter les grumaux, délayer avec 2 à 3 verres d’eau, en mélangeant toujours.
La consistance doit être celle d’une sauce béchamel. Certains plus familiers des « vieux produits » chers aux maquettistes d’avant l’avènement de la Publication Assistée par Ordinateur trouveront la ressemblance plus marquée avec le « sperme de canard »… Si la colle est trop épaisse la diluer encore. Mettre la colle chaude dans des pots stérilisés et bien boucher pour garder le produit plus que les 3 ou 4 jours généralement indiqués.
On pourra ajouter une ou deux gouttes d’essences de lavande ou de clous de girofle pour limiter le développement de micro-organismes. On conseille aussi l’extrait de pépin de pamplemousse pour ses propriétés bactéricides, ou l’essence de térébenthine (voir plus loin).
On constate évidemment que le temps de séchage est bien plus long par rapport à une colle vinylique diluée. C’est comme ça. On peut pallier le problème en ventilant les objets mis à sécher, avec un sèche-cheveux, sur un fil à linge, etc. Certains conseillent d’ajouter de l’essence de térébenthine, du fait de ses propriétés insecticides mais aussi siccatives. La siccativité du produit est bien connue dans la chimie complexe du procédé de peinture à l’huile, je ne sais pas s’il en est de même dans cette recette. À essayer donc.
Colle à la caséine ♥♥
Pour cette colle, certains préconisent de partir directement du fromage blanc pour retrouver la « colle de fromage » des bâtisseurs de cathédrale… Pour en savoir plus, voyez la recette de Nathalie Boisseau dans “Peindre et décorer au naturel, vol.1″ , reprise sur le site Esprit Cabane. Bon, je préfère l’approche de Bruno Gouttry dans “Peintures et enduits bio”, qui me semble plus rigoureuse en partant de la caséine en poudre et évite par exemple le borax, suspecté de produire un caséinate restant soluble dans l’eau. Bon, mais l’essai « colle de fromage » sera tout de même à tenter un jour. Noter que la société Caseo commercialise une colle de menuisier à la caséine bio, à essayer aussi un de ces jours.
Il y a deux possibilités : faire interagir la caséine avec du carbonate d’ammonium ou de la chaux éteinte. Pas de différence notable constatée quant à la qualité de la colle. Le carbonate d’ammonium n’étant pas d’odeur très agréable, j’opte pour la seconde méthode et adapte la recette utilisée non pas pour la peinture à la caséine mais pour la sous-couche à la caséine.
- eau : 16 parts
- caséine : 2 parts
- chaux éteinte ou carbonate d’ammonium : 1 part
Mélanger au fouet la caséine et la chaux dans la moitié de l’eau. Laisser reposer une demi journée et ajouter le restant d’eau. Après une demi-journée supplémentaire la chaux se dépose au fond, utiliser la partie liquide comme colle.
Conservation = quelques semaines. Pour la peinture à la caséine, article à suivre un de ces 4.
Colle de riz
Mauvaise manip ? Mauvais riz ? Essai qui ne me semble pas concluant par rapport aux formules avec farine ou caséine. Qui plus est beaucoup de riz utilisé pour peu de colle donc un rendement des plus légers… Qu’à cela ne tienne, et comme « la colle de riz est connue depuis toujours en Asie », voici la recette qu’il faudra bien un jour réessayer ?
Pour les sources utilisées, voir l’article précédent le coin du p’tit chimiste.
Le coin du p’tit chimiste
Je vous en entretenais il y a quelque temps, de cette volonté (d’essayer) de me passer des produits industriels pour fabriquer moi-même mes colles, enduits et peintures, et tenter de faire de mes « maisons en carton » des produits un peu plus biodégradables ; un peu plus, parce que les colles industriels des cartons, les encres des papiers journaux…
Il n’est pas question ici de… coller à un air du temps dont ceux qui me connaissent savent que je me soucie assez peu, plutôt adepte de l’air de rien. Peut-être un retour aux sources puisque nombre des produits utilisés me ramènent à ma « bible » de jeunesse, soit l’indémodable « Technique de la peinture à l’huile » de Xavier de Langlais (du moins les chapitres consacrés à l’huile… et non à l’acrylique) : colle de peau, craie, plâtre, caséine, chaux, etc.
Et me ramènent aussi à la cuisine : œufs, farine, amidon, sucre, sel, riz…
Et aux bonnes odeurs : essences de lavande, de clous de girofle…
Cette exploration qui dans l’avenir doit me permettre d’apporter des solutions aux immeubles parisiens miniatures et autres créations cartonnesques, est déjà menée pour refaire mon stock de « supports à peindre » : depuis longtemps j’apprécie les matières récupérées, par exemple 3 ou 4 feuilles de papiers journal collées ensemble ou sur du carton et enduites pour obtenir un truc plein de bosses et d’accidents genre parchemin. Une surface moins absorbante, moins intimidant aussi pour moi qu’un beau et cher papier aquarelle… que je me voudrais de gâcher ! Allons-y donc, voyons comment mettre au point des colles et enduits me permettant de me passer des colles vinyliques et autre gesso à senteurs ammoniaquées (quoiqu’avec le carbonate d’ammonium, on y retourne…).
Deux livres pour me guider :
– « Peintures et enduits bio » de Bruno Gouttry aux éditions Terre Vivante ;
– « Peindre et décorer au naturel, vol.1 » de Nathalie Boisseau aux éditions Alternatives.
Le deuxième offre davantage de « fiches cuisine », mais le premier m’est apparu plus rigoureux (produire de la colle à la caséine à partir de fromage blanc plutôt que de caséine en poudre est amusant mais… voir réserves dans l’article qui sera consacré plus tard aux colles).
Et pas mal de sites Internet dont Esprit Cabane, et d’autres permettant de se procurer des produits (qui par ailleurs peuvent maintenant aussi se rencontrer dans certains magasins de bricolages) : La marchande de couleurs, Caseo, 123 Matières, Ecodis.
Le laboratoire est ouvert. Et vos propres recettes (comme en pâtisserie, de vraies recettes, c’est-à-dire testées…) attendues.
Prochain article : sur les colles. À suivre !
Petit récapitulatif photo
Voici quelques traces photo de l’étape carton pour les trois premiers modèles réduits. Quel plaisir ! Espérons que les étapes suivantes enrichiront cette belle matière sans l’abîmer…
Les dimensions pour vous donner une idée :
«Toits #1» : largeur : 25 cm – longueur : 35 cm – hauteur : 15 cm
«Vieux Paris #1» : largeur : 22 cm – longueur : 27 cm – hauteur : 28 cm
«Rue Galande» : largeur : 30 cm – longueur : 50 cm – hauteur : 35 cm
Comme vous le voyez, le dernier modèle – dont l’échelle est pour moi plus confortable (moins de minutie) – oriente vers des constructions de taille déjà maousse.
Nouveau modèle en cours avant les essais colles / enduits / peintures : « Petite ceinture #1 ». À suivre !
« Dans l’carton, y’a qu’du bon ! » ou Le bonheur est dans la poubelle
Le Paris en carton a commencé à se construire. D’abord, pour se faire la main, un ensemble de toits seuls, puis un premier pâté d’immeubles. Ma technique d’avancée « en favela » semble la plus appropriée, en tous cas pour moi la plus excitante : un mur, un immeuble, un toit, un autre mur par ci et par là, une autre maison, un autre toit, etc. chaque élément appelant en quelque sorte le suivant. Le pâté s’arrête comme s’arrête un tableau, quand les modifications qu’on voudrait apporter enlèvent plus qu’elles n’ajoutent. Évidemment ce type de construction a plusieurs conséquences : si je m’appuie sur la foule d’éléments visuels dont je dispose, et si donc on retrouve ici ou là un toit, un immeuble, un recoin existant, la maquette a sa propre logique et ne reproduit pas un endroit donné. Tant mieux sans doute. Ensuite, et du fait même de cette construction par ajouts successifs, les modèles risquent davantage de correspondre à un « vieux » Paris plutôt qu’à la ville actuelle reflétant les planifications hyper organisées d’Haussmann. Bon, de toutes façons les choses iront où elles voudront aller, suivons le mouvement.
Pas de doute, il était temps de se remettre à la matière pour écarter les doutes naissant quant à ce projet de recréer des « maisons en carton ». Retrouver un vieux camarade comme le carton redonne énergie et plaisir de jouer (parce que les adeptes du bricolage savent que tout ça est sous-tendu par l’amusement et le jeu des mains, vilain ou pas). Exploré de façon libre par collages dès 1990, le carton était la base des « maisons » montréalaises. Mais là c’était un peu un carton « honteux » puisqu’il se cachait sous d’épaisses couches d’enduits et de peintures acryliques et aurait tout aussi bien pu être remplacé par un autre matériau. Apparemment rien de tel dans les maisons parisiennes actuellement en démarrage : le carton se montre avec ses textures et ses accidents. Tant mieux !
Le bonheur est dans la poubelle
Le bac de recyclage et les rebuts de supermarchés regorgent de merveilles : cartons fins des boîtes de biscuits ou des pots de crèmes, emballage de papier toilette, etc ; cartons ondulés à double ou triple cannelure (mention spéciale pour les gros cartons De Cecco du Franprix de la rue de Picpus) ; certains cartons à chaussures à mini ondulations (merci à Marie Jo pour l’information) ; les cartons d’Amazon ; des cartons mous, des cartons durs ; des boîtes d’oeufs en papier mâché, etc. Sans oublier la gamme des papiers, papiers journaux. J’opte pour le Canard Enchaîné avec son encre qui tâche. Je n’ai pas l’orgueil d’espérer comme des amis potiers que mes bricolages seront conservées et déterrés dans 2000 ans, mais au cas où cela adviendrait, je préfère que les gens d’alors puissent avoir des lectures distrayantes. Évidemment bien d’autres matériaux seraient à explorer : boîtes de conserve, cannettes en alu. Un jour peut-être, il faudra alors voir quelque maître africain du recyclage…
Le carton c’est aussi une facilité : un matériau versatile qui ne nécessite que des outils simples. Et une gamme de transformations permettant de souligner la texture ou de la créer, déchirer d’un bloc ou par « strates », recoller, frotter à la brosse de fer, humidifier, plier et triturer. Un jeu d’enfant vous dis-je… Sans compter les erreurs, les repentirs, les mauvaises coupes, toutes bonnes choses que je peux ici garder pour enrichir encore la matière.
L’étape suivante ? Quand certains de ces squelettes cartonnesques auront l’air assez solides pour savoir marcher tout seuls, commencer les tests des enduits et des peintures bios. Quelle aventure ! Quel suspense insoutenable ! À suivre…